Grèbes jougris & esclavon

"Grèbe jougris” “Grèbe esclavon”
(Podiceps grisegena) (Podiceps auritus)

Grèbe esclavon (nuptial puis hiver) Grèbe jougris nuptial
Aquarelle de Paul Barruel, illustrateur des œuvres de Paul Géroudet

(Guide Ornitho – Delachaux & Niestlé)

Ces deux oiseaux, de l’ordre des Podicipédiformes appartiennent, comme les Grèbes
huppé, à cou noir, à gros bec ou castagneux, à la famille des Podicipédidés ou grèbes,
la seule de cet ordre existant en Europe.

Le terme Podicipédidés vient de deux mots latins : podex=croupion et pes = pied ou
plutôt ici , les pattes du corps, d’où leur surnom de “pattes en cul”. Grèbe, nom employé
par Belon au XVIème siècle, viendrait de “grabuge”, comme en italien “garbuglio” qui
veut dire tumulte, désordre, confusion.Ceci évoque l’animation perturbatrice apportée
par les manifestations vocales et les nages bruyantes des grèbes lors de la formation des
couples.

* Podiceps auritus : ( Grèbe esclavon)

Auritus, en latin,veut dire “qui a de longues oreilles”ou des “oreilles de lièvre”.En fait,
il s’agit de la bande dorée si particulière qui part de l’œil jusqu’en arrière de la tête de
l’oiseau, en été, et qui évoque de courtes cornes.C’est la même idée en anglais”Horned
grebe”, en allemand “Ohrentaucher”=plongeur à oreilles ou en italien= svasso cornuto.

Esclavon vient du latin médiéval “sclavus”, mot issu du slave primitif “sloveninu”.Esclave,
slave, slovène, et esclavon ont la même origine.Le passage de slave à esclave remonte au
haut Moyen-Âge, période où les grecs et les germains allaient fréquemment capturer des
esclaves dans les Balkans.Le grèbe hibernait en Slavonie ou Esclavonie, région imprécise
qui selon le Larousse du XXème siècle,concernait les Balkans et un ancien royaume de
l’Europe du nord, dans la région de Lübeck.

Comme il se reproduit dans une zone allant de la Baltique à la Russie, il est bien “un slave”
aux yeux des européens de l’ouest.En espagnol, il est le ”plongeur à cou rouge” (Zampullin
cuellirrojo) et en italien, Strapozoturco dans lequel “turco”(turc) signifie “qui a des ornements
sur la tête” comme le turc qui porte un turban.

Cet oiseau, de la taille d’un sarcelle, (L=31/38cm – E 46/55cm) nous est peu familier,
seulement présent le long des côtes de la Manche et de Bretagne, en hiver, signalé en Camargue
et en Corse.Présence irrégulière sur les grands lacs de Champagne.

Le Delta du Danube nous permettra de le voir dans sa superbe tenue nuptiale : couleur brun
rouge du cou et de la poitrine, grosse tête noire ornée de deux touffes étroites de plumes
rousses partant de l’oeil vers le derrière de la tête, qu’elles dépassent comme deux petites
cornes. Dos brun noir et flan roux.

Les parades nuptiales sont particulièrement originales : postures du “chat” – “danse du
manchot” (cf Paul Géroudet).

Le Grèbe esclavon fréquente surtout les baies, les estuaires des côtes maritimes et au
printemps les lacs ou étangs en eaux peu profondes. Il niche parmi une végétation pas
très dense à faible distance des rives.

Son régime alimentaire consiste en poissons tels épinoches, anguilles, truites, gobies,
en insectes tels éphémères, libellules, coléoptères ..., il mange aussi des vers.

Les oiseaux d’Europe migrent pour la plupart à l’intérieur du périmètre ; ceux d’Islande
en Ecosse, Irlande, Norvège, ceux de Suède et de Finlande vont dans l’ouest de la Baltique
et en Mer du Nord.

* Podiceps grisegena : ( Grège jougris)

Grisegena vient du latin gemea = joue et du bas latin griseus = gris. En anglais “rednecked”
et en allemand “rothals”, c’est la couleur rousse du cou à la période nuptiale qui est signalée,
comme en espagnol, “smormujo cuellirrojo” et en italien, “savasso collorosso”.

Cet oiseau plus grand que le précédent (L = 40/46 cm – E = 70 cm) s’installe sur de
petits plans d’eau avec une végétation aquatique touffue. Il prend ses proies à faible
profondeur en enfonçant la tête et le cou, plus rarement à la surface et sur la végétation.
On a compté de trois à six plongeons à la minute et l’oiseau parcourt généralement sept
à huit mètres sous l’eau. Les plongeons atteignent quatre vingt dix secondes et jusqu’à dix
mètres de profondeur.

Son régime alimentaire est constitué d’invertébrés, punaises aquatiques, larves, dytiques,
libellules, mais aussi grenouilles, têtards et poissons alevins de deux à sept centimètres,
carpillons, épinoches, perches, gardons, anguilles. L’hiver, ce grèbe se nourrit de harengs,
gobies, chabots. Ration quotidienne estimée à cent quatre vingt grammes.

La maturité sexuelle est atteinte durant la deuxième année. le Grèbe jougris niche en couple
isolé ou en petites colonies proches ou non de celle des Foulques macroules ou des Mouettes
Rieuses.

Il se reproduit dans la moitié orientale de l’Europe. Comme migrateur hivernant, il se
montre régulièrement mais en très petits nombres sur les côtes françaises et belges.

Chants et cris

*GREBE JOUGRIS : Divers cris de parade sur l’eau et cris des jeunes.

*GREBE ESCLAVON : Cris de parade d’un couple sur l’eau et chant.

(Extraits du " COFFRET ORNITHO SITTELLE "-
http://www.sittelle.com )

AB

Bibliographie :

"Les Palmipèdes d’Europe" de Paul Géroudet (Delachaux & Niestlé
"L’étymologie des noms d’oiseaux" de Pierre Cabard et Bernard Chauvet